A la demande de Daudie je déplace ce message ici
Petite histoire de l'art moderne
Pour s'y retrouver un peu, une petite analyse qui date de l'époque où j'étais encore intelligente (
), lors de mon année de maîtrise... Elles sera peut-être un bon point de départ pour approcher la variété de l'art moderne et l'art abstrait en particulier.
LA PEINTURE MODERNERéalistes et impressionnistes sont d'abord concernés par le monde tangible qui se présente à nos yeux. Or nous savons tous qu'il existe d'autres mondes: ceux de l'intellect, des émotions, de l'imagination, du rêve, de l'âme. C'est cette sorte d'évidence interne que l'artiste peut tenter de rendre visuellement perceptible:
expressionnisme. Il y a alors
transformation des images et formes empruntées au monde extérieur sous la pression de ces forces intérieures.
CF
Van Gogh Matta (A l'écoute du vivant)
Gauguin (Manao Tupapau, l'esprit des morts veille)
Matisse Kandinsky.
=>
Deux voies pour aller vers l'abstraction:- celle qui fait appel à la logique structure/géométrie : Cézanne et Seurat --> Picasso, Gris --> Mondrian;
- celle qui fait "chanter" les couleurs et les formes : Gauguin --> Matisse --> Kandinsky.
- Les REALISTES se concentrent sur les objets du monde visible et sur ce qu'ils suggèrent;
- Les IMPRESSIONNISTES s'intéressent aux effets de lumière;
- Les EXPRESSIONNISTES opèrent une distorsion des formes naturelles et une transmutation des couleurs, dans un but décoratif ou pour accroître l'intensité émotionnelle;
- Les FUTURISTES s'attachent à traduire le mouvement;
- Les CUBISTES fabriquent à partir des choses et des êtres des compositions éclatées en plans angulaires;
- et enfin, les ROMANTIQUES et les SURREALISTES. Au lieu de se fonder sur la description des des choses comme les réalistes, sur les effets émotionnels comme les expressionnistes ou sur l'invention formelle comme les cubistes, ils font appel à notre goût pour le mystérieux, le romantique, l'étrange, le magique, l'onirique.
CF
Byder (Les travailleurs de la mer)
Rousseau (La bohémienne endormie)
Chagall De Chirico Dali...
Les montres molles appartiennent à l'univers hypnagogique. Elles sont irrationnelles, impossibles, fantastiques, paradoxales, dérangeantes, déconcertantes, inquiétantes, absurdes, folles : pour les surréalistes ce sont les plus grands compliments! Parti-pris: c'est du subconscient qu'émane tout ce qu'il y a de valable en art.
Cf aussi
Miro Paul Klee Max Ernst Blume (La Ville Eternelle, surtout)
L'ART ABSTRAITOrigine de l'art abstrait: Kandinsky. Premier à aboutir à une vision abstraite
consciente et non passagère, et surtout parce qu'il est le seul parmi les pionniers de l'art abstrait à ne pas avoir été retenu par le cubisme. K. mise sur la couleur en tant que moyen d'expression complet...
cf le topic
Couleur et paradoxe pour l'approfondissement de ce thème.
Pendant que la couleur se libère de la représentation, la construction et le concept du volume et de la ligne changent également avec
Cézanne et
Seurat. Dans leurs tableaux la forme se consolide. La peinture remonte de l'accidentel à l'absolu, de l'objet à la géométrie de l'objet.
Le CUBISME relaie Cézanne. La forme conduit tout droit à l'art abstrait. Les CUBISTES ne rejettent pas la réalité. Objets et êtres sont présents, mais leurs formes, au lieu d'être reprises, reproduites à la lettre, sont analysées. Ceci va croissant... dans la dernière phase du CUBISME (1912-1913),
Braque et
Picasso procèdent à une synthèse de toutes les données issues de l'analyse des formes.
Mais le monde extérieur n'est pas encore renié.Or,
Mondrian part du dernier état de synthèse cubiste et en épure les traits jusqu'à l'abstraction totale.
Malévitch aussi.
1910-1916:
-
Kandinsky tente de donner des assises à l'art abstrait en rationnalisant l'expérience intuitive de la couleur.
-
Mondrian rationnalise le comportement de la forme, persuadé d'atteindre à un absolu.
- mais
Malévitch, d'un bond, voit l'extrême point de ce double processus de rationnalisation lorsqu'il peint en 1918 son
Carré blanc sur fond blanc: la forme absolue et la couleur absolue ne peuvent être que la fin de la peinture.
(Lui entendait
fin comme but et aboutissement... on peut se demander si cela n'en est pas aussi la fin comme terme, mais ce n'est pas le sujet ici et je me retiendrai de prendre parti, bien que cela me brûle les doigts!
contentons-nous de poursuivre l'analyse...)
Le développement de l'art abstrait a donc fini par montrer les limites du rationnel; => réaction : irruption de l'irrationnel au sein-même de l'abstraction.=> seconde phase de l'art abstrait (depuis la fin de la guerre)
De là l'attrait pour la source de l'irrationnel : le subconscient.
attention, ne pas associer systématiquement SURREALISME et subconscient.
Le champ du subconscient exploré par le surréalisme est réduit parce qu'il reste dans les limites de la figuration. Exploration partielle car elle confère au subconscient illimité et mouvant les limites rigides et dominatrices du conscient.
A l'inverse, dès 1945, une autre partie du mouvement abstrait tente d'arracher par tous les moyens des lambeaux au subconscient, et les offre au regard tels quels: balbutiements encore informes (
Wols) ou incursions à perte d'haleine (
Pollock). Le but est d'attirer la sensibilité au coeur de ce qui n'a pas de nom.
Alors ce n'est plus le subconscient qui émerge de la clarté de la conscience, c'est la conscience qui, à la faveur des sens, est contrainte d'affronter l'opacité du subconscient. C'est la descente à pic vers l'expérience: la conscience a cessé d'être normative.
CONCLUSIONIl y a une ligne de démarcation très nette entre les 2 phases de l'art abstrait, la première liée encore à la philosophie idéaliste traditionnelle, tandis que la 2ème relève déjà de la philosophie existentielle.
A une peinture abstraite axée sur l'espace (l'espace "dimension de l'être" selon Bettini) succède une autre déployée dans le temps, le temps comme "émergence de ce qui existe".