Alors me voilà peaufinant (pinaillant???) depuis quelques semaines déjà mes écritures.
Je suis toujours démangée par l'envie de découvrir les liens que l'on peut opérer entre les notions d'artiste et d'engagement, d'abord et avant tout, parce que VM, de manière accentuée ces quelques derniers mois (mais il n'est pas le seul), car VM donc s'engage, (littéralement
met en gage/attache sa personne) à médiatiser (mais le terme ici employé demeure insatisfaisant) certains faits tenant notamment à la vie politique US.
Il se positionne en vecteur d'idées au travers de son art, et plus précisément, au travers de son travail d'écriture.
Revenons à la source de cette réflexion : l'
art engagé. Ses origines et sa nature découlent de son objectif :
Ne pas ignorer le Monde.« Par l'art seulement nous pouvons sortir de nous, savoir ce que voit un autre de cet univers qui n'est pas le même que le nôtre, et dont les paysages nous seraient restés aussi inconnus que ceux qu'il peut y avoir dans la lune »
Proust, A la recherche du temps perdu.Agir, interagir, combattre, véhiculer, s’opposer, affirmer, soutenir… Le processus de création artistique est un puissant vecteur d’idées, de concepts, d’images ou de représentations inattendues parfois du Monde visible et nous conduit par delà ses limites pour rendre visible à nos sens un Monde nouveau, encore inconnu.
Cet acte créateur engage certainement son auteur ne serait-ce que parce qu’il l’habite et l’anime lors de son élaboration.
Mais cette vision est par trop restrictive, et l’art engagé ne peut se résumer à ces quelques mots.
Quid de l’art engagé alors ? Nous nous étions premièrement penchés sur l’art et les ruptures politiques et artistiques qu’il peut engendrer. Reste qu’après réflexion, cette approche m’a paru trop restrictive de sorte que tout un pan de la problématique envisagée semblait devoir être mise de côté. Alors qu'en est-il ?
L’art engagé ne cherche plus (seulement) à produire de la beauté puisque dès lors la création artistique matérialise une action visant à réagir voire
influer sur son propre environnement (pris en son acception la plus large).
L’art engagé serait donc la manifestation d’une volonté de
prendre position.L’art se séparerait de la pure problématique de l’esthétique pour endosser une autre finalité : ouvrir le champ de la pensée et de la représentation de l’immédiat pour questionner son environnement et modifier le rapport jusqu’alors entretenu avec lui.
En somme
se taire est impossible de sorte que le silence est toujours une prise de parole.Mais alors, l’art est-il engagé par essence, sans que l’artiste ait consenti à cet engagement, sans qu’il en ait exprimé le désir?
Tel est le parti de l’auteur
Eric Cobast suivant lequel
« l’œuvre d’art dévoile, elle ne reproduit pas ce qui est, elle donne à voir et à sentir ce qui était avant elle inaperçu […].» Bien sur, une œuvre est engagée lorsqu’elle exprime un parti pris et intègre dans une lettre ouvertement menée de son auteur.
Mais cette perception de l’art engagé est insuffisante:
« Elle feint d’ignorer que toute œuvre est un acte de dévoilement du réel […]. Il n’y a pas d’œuvre qui ne trouve sa satisfaction dans un engagement par rapport au contexte qui l’a vu naître […]. L’engagement apparaît comme ce mécanisme de digestion, d’appropriation du réel, « biologiquement » indispensable à une œuvre d’art ».
Eric Cobast, Petites leçons de culture générale .Pourtant, s’engager c’est « mettre en gage » ; de sorte que l’engagement s’entend aussi de l’existence d’une responsabilité.
En s’engageant pour tel fait, telle cause politique ou telle personne, tout artiste se porte garant de l’action, de la cause ou de la personne pour laquelle il/ elle décide de s’engager.
Voici ce que
Sartre disait à propos de l’écrivain:
« [il] est en situation dans son époque : chaque parole a des retentissements. Chaque silence aussi. Je tiens Flaubert et Goncourt pour responsables de la répression qui suivit la Commune parce qu’ils n’ont pas écrit une ligne pour l’empêcher. Ce n’était pas leur affaire, dira-t-on. Mais le procès de Calas, était-ce l’affaire de Voltaire ? La condamnation de Dreyfus, était-ce l’affaire de Zola ? L’administration du Congo, était-ce l’affaire de Gide ? Chacun de ces auteurs, en une circonstance particulière de sa vie, a mesuré sa responsabilité d’écrivain ».Il définit donc l’intellectuel engagé (par extension l’artiste) comme
«[celui qui se range] du côté de ceux qui veu[t]changer à la fois la condition sociale de l’homme et la conception qu’il a de lui-même.»Il s’agit donc visiblement d’une manifestation de sa volonté.
A suivre